Bien souvent, le terme « anarchie » est utilisé pour décrire le chaos, les guerres civiles et les situations de désordre social.
On peut y voir deux raisons.
La première, sans doute la moins importante, provient du terme « anarchie », interprété comme l’absence d’ordre, de règles et de structures organisées, bref : le chaos de l’anomie sociale. Ce n’est pourtant pas ce que prônent les anarchistes. Pour éviter cette confusion entre anarchie politique et anomie, confusion qui dénature les idées de l’anarchisme, les anarchistes utilisent parfois le mot « acratie » ou libertaire (terme inventé par Joseph Déjacque, défenseur de la liberté politique), comme synonymes d’anarchiste.
La seconde, plus concrète et plus forte, provient des luttes anarchistes au tournant des XIXe siècle et XXe siècle en Europe. À cette époque, le mouvement anarchiste a été marqué par les illégaux ou illégalistes qui voulaient sans attendre pratiquer l’anarchisme (et donc ignorer purement et simplement les « lois », considérées comme illégitimes), le diffuser et lutter activement contre les oppressions, y compris par la violence. Concrètement, des anarchistes ont escroqué, volé et tué au nom de leur doctrine, avec comme victimes des puissants (princes, ministres, riches, compagnies d’assurances, etc.), des serviteurs de l’État (douaniers, policiers, etc.), et des gens plus ordinaires. Quelle qu’ait été l’importance réelle de ce courant, il a énormément frappé les esprits. Par ailleurs et inversement, par non violence, des anarchistes pacifistes, refusaient la conscription et pratiquaient l’insoumission : dans le contexte de l’époque, cela était aussi (voire plus !) insupportable. Tout cela a justifié des « lois scélérates » à la fin du XIXe siècle dans de nombreux pays et stigmatisé l’ensemble des anarchistes, tandis que « anarchiste » ou « Ravachol » devenait une injure.
L’usage du terme libertaire s’est d’ailleurs répandu en France avec l’interdiction des mots de l’anarchisme, pour des raisons sociales et juridiques (être l’auteur de « propagande anarchiste » est resté passible de prison jusqu’en 1994).